Le recours restrictif de la procédure avec négociation
La volonté de négocier un achat constitue un souhait constant des prescripteurs et ce, même si le seuil de la procédure formalisée est dépassé. Pourtant, le recours à la procédure avec négociation est assez limité.
Aux termes de l’article L.2124-3 du Code de la commande publique, « la procédure avec négociation est la procédure par laquelle l’acheteur négocie les conditions du marché avec un ou plusieurs opérateurs économiques ».
Cependant, l’article R.2124-3 du même Code prévoit une liste limitative de six cas dans lesquels les pouvoirs adjudicateurs – au contraire des entités adjudicatrices qui le peuvent librement – peuvent recourir à la procédure avec négociation, à savoir :
• Lorsque le besoin ne peut être satisfait sans adapter des solutions immédiatement disponibles ;
• Lorsque le besoin consiste en une solution innovante : le Code donnant une définition précise de ce qui est entendu comme une innovation ;
• Lorsque le marché comporte des prestations de conception ;
• Lorsque le marché ne peut être attribué sans négociation préalable du fait de circonstances particulières liées à sa nature, à sa complexité ou au montage juridique et financier ou en raison des risques qui s’y rattachent ;
• Lorsque le pouvoir adjudicateur n’est pas en mesure de définir les spécifications techniques avec une précision suffisante en se référant à une norme, une évaluation technique européenne, une spécification technique commune ou un référentiel technique ;
• Lorsque, dans le cadre d’un appel d’offres, seules des offres irrégulières ou inacceptables, au sens des articles L. 2152-2 et L. 2152-3, ont été présentées pour autant que les conditions initiales du marché ne soient pas substantiellement modifiées ;
La diversité des choix semble laisser une certaine latitude pour les pouvoirs adjudicateurs d’avoir recours à la procédure avec négociation. Dans la pratique, le juge administratif ne leur admet cette possibilité que dans de rares cas.
A titre d’exemple, à propos de la réalisation de diagnostics immobiliers portant sur un parc immobilier nombreux, disparate, disséminé sur un grand nombre de communes, le Conseil d’Etat a jugé que le choix de cette procédure par une collectivité, se basant sur le fait que ces « prestations ne pouvaient être réalisées qu’au prix d’une adaptation par les candidats « de solutions immédiatement disponibles », devait être rejeté. En effet, il a estimé que les diagnostics exigés par différentes réglementations étaient connus et normalisés et ce même s’ils devaient être réalisés à grande échelle sur un vaste territoire (CE, 7 octobre 2020, n°440575).
En outre, en pratique, cette procédure est susceptible d’être assez longue puisqu’elle est divisée en deux phases (réception des candidatures/analyse et réception des offres/analyse) avec des délais minimaux à respecter impérativement. Les phases de négociations peuvent elles-mêmes être assez longues.
Par conséquent, l’emploi de la procédure avec négociation demeure particulièrement délicat dans la mesure où même si le pouvoir adjudicateur estime au premier abord que l’objet du marché et ses caractéristiques relèvent d’un des six cas précédemment cités, celui-ci pourrait faire face à une appréciation assez restrictive de la part du juge administratif.
De même, le prescripteur doit également être informé de la durée du planning prévisionnel lequel peut mettre en péril la continuité de service pour certains marchés.